Ours blanc Pompon François Supéry Jean-Joachim

Ours blanc

Dimensions

H. : 163 cm ; L. : 251 cm ; Pr. : 90 cm

Provenance

Technique

Sculpture

Matériaux

Calcaire (pierre de Lens)

Datation

1928-1929 - Oeuvre originale en plâtre présentée au Salon d’automne de 1922

Lieu de conservation

France, Paris, musée d’Orsay

Comment saisir dans la pierre le mouvement de l’animal en marche ?

Né en 1855 à Saulieu, en Bourgogne, François Pompon apprend le métier de tailleur de pierre à Dijon, tout en suivant les cours du soir de l'école des Beaux-Arts. Il s'installe ensuite à Paris et poursuit sa formation à la « Petite École » (ancienne appellation de l'École nationale des arts décoratifs), où il reçoit l'enseignement du sculpteur animalier Pierre Louis Rouillard (1820-1881).

Les qualités humaines et professionnelles de Pompon font de lui un praticien très recherché sur la place de Paris. Des années 1880 jusqu'en 1914, il taille le marbre pour les plus grands sculpteurs de la fin du XIXe siècle : il travaille successivement dans les ateliers d'Antonin Mercié (1845-1916), d'Alexandre Falguière (1831-1900) et d'Auguste Rodin (1840-1917). Il devient le chef d'atelier de ce dernier en 1893, et taille également pour Camille Claudel (1864-1943). Son début de carrière personnelle se développe ainsi à l'ombre d'artistes renommés et demeure modeste.

Une gloire tardive

Le plâtre de l'Ours blanc, présenté au Salon d'automne de 1922, est la sculpture qui rend Pompon célèbre alors qu'il est déjà âgé de 67 ans.

Ce succès lui vaut la commande, en 1927, d'une réplique en pierre de Lens image principale de l'État pour le musée du Luxembourg (aujourd'hui conservée au musée d'Orsay). Celle-ci, exécutée par son praticien Jean-Joachim Supéry, est livrée en 1929. D'autres versions, de pierre ou de bronze, voient le jour. La manufacture de Sèvres en édite aussi des exemplaires en biscuit et en porcelaine dès 1924.

Une recherche de simplification novatrice

L'animal est représenté grandeur nature, dans l'attitude de la marche, avançant de ses pattes épaisses image b image d. Sous son apparente pesanteur, tout est mouvement les muscles vibrent, arrondissant, en plein ou en creux, les flancs de l'animal, dont le profil est simplifié image c. Nulle trace de pelage, nulle griffe tracée sur la pierre claire et lissée. Par ses masses harmonieuses, épurées, l'ours blanc délivre un sentiment d'éternité.

« J'aime la sculpture sans trou ni ombre », proclame Pompon. Dans le vaste panorama de la sculpture du XXe siècle, l'œuvre de l'artiste, dans sa quête de formes pures et essentielles, traduit elle aussi le changement esthétique, à l'instar de celles de Constantin Brancusi (1876-1957), qui affirme : « Ce n'est pas la forme extérieure qui est réelle, mais l'essence des choses. Partant de cette vérité, il est impossible à quiconque d'exprimer quelque chose de réel en imitant la surface des choses. »

Pompon, attentif aux nouvelles recherches plastiques, développe tout au long de sa carrière un intérêt croissant pour l'esthétique japonisante, alors très en vogue dans les milieux artistiques. Il se montre également fasciné par l'art égyptien image 1 et les animaux sacrés. Il semble donc bien attiré par ces arts de simplification, allant à l'essence des choses. Ce qui l'intrigue, ce qu'il souhaite pouvoir reproduire est le mouvement, l'attitude de l'animal qui se déplace.

Un sculpteur animalier

Si Pompon est consacré comme sculpteur animalier, ses premières œuvres se tournent vers la figure humaine. Il expose effectivement quelques portraits sculptés au Salon de 1879. Sa première pièce de grande taille est Cosette (1887), aujourd'hui conservée à Hauteville House, la maison de Victor Hugo à Guernesey.

L'année 1905 marque un tournant dans sa carrière. À partir de cette date, Pompon observe les animaux au Jardin des Plantes et au Muséum national d'histoire naturelle, qui lui servent de modèles. C'est, semble-t-il, une oie vue à contre-jour qui lui révèle cette envie de forme réduite, comme épurée.

Avec le sculpteur René de Saint-Marceaux (1845-1915), pour lequel il travaille jusqu'en 1914, il passe régulièrement l'été en Normandie. Là, l'artiste aime étudier les animaux de la basse-cour, dont il ne se lasse pas d'observer le perpétuel mouvement. Pour l'occasion, il fabrique un établi portatif qui lui permet de travailler la terre glaise, directement en plein air. Mais il ne se contente pas de ces premières esquisses : il les reprend ensuite à l'atelier et les transpose en plâtre.

L'œuvre de Pompon est un contre-pied total au réalisme, à tout l'art naturaliste, au goût du détail développé dans la sculpture du XIXe siècle image 2. Avec une grande économie de moyens, il réduit la forme animale à l'essentiel. Il élimine le pittoresque, l'anecdote. Il lisse les surfaces, il simplifie les formes aux contours arrondis. « Je fais l'animal avec presque tous ses falbalas. Et puis, petit à petit, j'élimine. » Désormais, un bestiaire de petits formats envahit son atelier.

Un jour, son ami Antoine Bourdelle (1861-1929), sculpteur également, lui conseille de travailler en « grand ». L'Ours blanc répond à cette idée.

Postérité

Pompon fonde en 1927 le Salon des animaliers contemporains. Veuf et sans enfant, il lègue ses œuvres à l'État français en 1929 et décède en 1933, célèbre mais toujours modeste.

Le contenu de son atelier parisien est transporté à Dijon en 1948. Le plâtre original de l'Ours blanc est exposé au musée des Beaux-Arts de Valenciennes. D'autres œuvres de l'artiste sont également visibles au musée des Beaux-Arts de Lyon, à La Piscine – musée d'Art et d'Industrie André-Diligent à Roubaix, au musée d'Orsay et dans des collections étrangères (Belgique et États-Unis d'Amérique). À Saulieu, ville natale de l'artiste, le musée François-Pompon expose une tête d'ours en bronze image 4 semblable à celle qui ouvrait la porte de son atelier. Aujourd'hui, l'Ours blanc reste une œuvre populaire et témoigne de la modernité de l'esthétique du sculpteur.

Mots-clés

Véronique Duprat-Roumier

Permalien : https://panoramadelart.com/analyse/ours-blanc

Publié le 14/04/2020

Ressources

Le commentaire de l’œuvre Ours blanc, tête monumentale de François Pompon sur le site internet de La Piscine – musée d’Art et d’Industrie André-Diligent (Roubaix)

https://www.roubaix-lapiscine.com/collections/sculptures/francois-pompon-1855-1933/

Le site internet du musée François-Pompon (Saulieu)

https://saulieu.fr/musee-francois-pompon#general